Les maisons courant d’air, les maisons moulins, les maisons vides, les maisons tristes.
Et puis les maisons fenêtres, les maisons murs, les maisons portes.
On peut aussi trouver des maisons de guingois, des maisons hautes et des maisons basses.
Et encore les maisons souvenirs.
Il y a ta maison, celle de tes parents, et pourquoi pas des grands-parents.
Tu traverses beaucoup de maisons dans ta vie.
Tu y passes, tu y dors, tu en oublies, parfois tu tentes aussi de les retenir.
Chaque lieu est marqué d’une maison.
Celle de ces vacances avec des amis quand tu étais gamine. Celle de ta grand-mère dont les pierres feront partie de celle de tes parents. Celle d’une autre grand-mère devant laquelle tu passes, mais qui ne t’appartient plus, alors que tu y a tes marques. De toute façon ce serait trop difficile d’y retrouver l’âme de tes rires, de tes Noëls, des bruits de tes pas sur les marches de bois.
Ta maison. Celle dont tu connais chaque étape de montage, comme un jeu de construction participatif dont tu connais toutes les arcanes. Les maisons qui se trouvent de nouveaux habitants, là-bas, loin dans les montagnes. Maison que tu vois en pièces détachées, dont tu devines le futur bonheur.
Les maisons de tes amis.
Il y en a une que tu commences à connaître comme ta poche.
C’est une maison lumineuse, où tout le monde circule librement. Tout est à porté, rien n’est caché. Les portes des armoires peuvent toutes être ouvertes, si tu voulais tu saurais chaque secret. Mais tu ne le feras jamais, parce que le respect, et puis comme une confiance infinie. Tu y laisserais tes enfants. D’ailleurs, où sont-ils ? En train de piller la boîte aux crayons ? Dessiner sur un livre, le goûter au point de le mâcher ? Ou bien, sont-ils au jardin à taper dans la balle ?
Toi, tu es bien.
Tu sais où sont les verres et les couverts, tu finiras par ne pas oublier que la porte du lave-vaisselle dégringole comme une pierre plate qui oublie son parachute, tu sais trouver les serviettes de bain pour la douche des petits, à force, tu ne demanderas plus. Enfin, si peut-être, le mode d’emploi du garage où finalement tout est. Si tu ne trouves pas, c’est là-bas, c’est sûr, comme un grenier aux trésors enfouis. Parce que l’essentiel est au bout de ta main, devant toi.
C’est comme un ballet.
Tu entres dans le salon par la baie vitrée, tu prends les assiettes dans le placard, tu croises l’ami qui en sort avec les verres, tu passes dans la cuisine où un autre ami épluche, tu ressors par la porte de ladite cuisine et tu te retrouves face au barbecue fumant, tenu par ton homme, enfin tu poses tes plats sur la table des enfants, sous le parasol. Il fait beau.
La porte de la salle de jeu ouverte sur la terrasse laisse passer le son du dessin animé alors que tu verses le Pineau-des-Charentes, fraîchement revenu des vacances dont tu viens de voir quelques photos sur l’appareil qui était tien, avant. Tu es contente, parce que les photos sont belles, tout fonctionne.
Soudain, tu réalises que tous les acteurs de la danse dans la maison aux mille portes, où tout est ouvert à l’amitié, tous tes amis et les tiens sont là, à porté de main, de voix, de regards.
Il y a le soleil qui chauffe ton dos.
Même s’il grêlait, tu n’aurais pas froid.
C'est l'instant.